Mon nom est Ruby et je suis accro
Depuis deux ans, je me bats avec une dépendance bien réelle : celle aux réseaux sociaux. Je ne l’invente pas : c’est bien prouvé que l’habitude nous procure le hit de dopamine associé à la gratification instantanée. Les dernières années, j’ai fait plusieurs pauses. J’ai essayé différentes stratégies pour venir à terme avec mon inconfort grandissant sur les plateformes sans avoir à les quitter, mais toujours, je me fais reprendre au jeu. Je me surprends à déjouer mes propres systèmes, à plier mes propres limites et à me retrouver 30 minutes plus tard avec le sentiment pernicieux de m’être moi-même violée.
La fausse promesse est que les plateformes sont là pour nous aider
J’ai grandi à l’ère prototype de l’internet. Où “the shit” était d’avoir son propre site web. Pendant 10 ans, j'ai été une avide utilisatrice de DeviantArt, et on pouvait y expérimenter un vrai sentiment de communauté. Si on suivait un artiste, on voyait immanquablement son travail passer, au moment exact ou il a été publié.
Au début, la prospective des réseaux sociaux émergents était reluisante. Via ces plateformes, plus besoin de site web ou de portfolio. La promesse était qu’en y déposant notre travail, on bénéficierait d’un espace facile d’accès à tous, user friendly et gratuit, pour y promouvoir notre travail.
Petit à petit, l’agenda a bien changé, avec l’arrivée de la publicité ciblée et des algorithmes. Au final, ces entreprises sont là pour faire de l’argent et trempent dans les nombres d’activités discutables (telles que la cybersurveillance et la censure). L’expérience y est conçue comme un “jeu” ou la loop est hautement addictive. Mais la vérité, c'est qu’on ne peut jamais gagner (ou comme à la loterie, on nous fait miroiter l'exemple de ces rares privilégiés qui, eux, ont réussi à se démarquer) et on garde notre audience en otage. Malgré mes presque 10 000 followers sur Facebook, je sais que peut être un maigre 5% de ceux-ci voient mon contenu.
Les réseaux sociaux nous font sentir comme de la marde
Pour les artistes visuels, et les petits entrepreneurs, le désir de satisfaction est intimement lié au besoin d’entretenir notre clientèle et à la peur d’être oubliés si on manque le bateau technologique.
Si nos posts performant mal, on se sent personnellement attaqués, notre valeur personnelle est minée et par conséquent, on devient anxieux. On redouble donc d’efforts pour mieux s’adapter, pour poster plus de contenu, on se moule aux exigences de ces compagnies qui se nourrissent de la culture du manque et de nos insécurités. Au fond, c’est comme être encore au secondaire. Et je sais pas pour vous, mais moi, j'ai détesté cette période de ma vie. Ce désir fébrile de faire partie du cool kid club (et d'échouer).
Les réseaux sociaux conditionnent nos désirs
Pas seulement à travers la publicité ciblée, mais aussi en nous comparant sans cesse à la vie des autres. Si eux ont l'air heureux dans leur mode de vie, par conséquent, c'est le modèle à quoi nous devrions aspirer aussi. La carrière, les relations, les expériences, le look... le hic, c'est que la spirale du prochain but à atteindre est sans fin. On est brainwashé à longueur de journée dans un rêve capitaliste qui n’est pas le nôtre et on se demande pourquoi nous sommes constamment épuisés, déprimés et insatisfaits. Il m’a fallu beaucoup de temps seule avec moi-même (merci la pandémie) pour finalement reconnecter avec qui je suis vraiment et trouver comment moi, j'avais envie de vivre.
Les réseaux sociaux nous forcent à apprendre des compétences inutiles
Avant, il suffisait d’un contenu de qualité. Et devant le recul de l’engagement sur mes posts, j'ai commencé à m’interroger. On me dit que maintenant “il faut faire des reels pour être vus”. Moi, je réponds : No. Fucking. Way.
Je n’ai ni le temps ni l’énergie de développer un ensemble de compétence (la production vidéo) qui n’ont aucune autre application pour moi dans le monde extérieur pour faire plaisir au Dieu de l’algorithme. Je refuse de dilapider mes ressources les plus précieuses (mon temps et mon énergie) à produire un contenu spécialement taillé pour le bénéfice l’entreprise d’un autre (M. Zuck) et supporter les pratiques sans étiques de ces corporations sans scrupules. Moi, j’aime dessiner, j’aime écrire et à la limite prendre des photos. Et dans ce sens, je suis dépassée et je refuse de me prostituer. Je souhaite garder ma présence en ligne à mon "vrai contenu".
On devient victimes de la chambre d’écho
La chambre d’écho est un environnement dans lequel une personne ne rencontre que des croyances ou des opinions qui coïncident avec les siennes, de sorte que ses opinions existantes sont renforcées et que des idées alternatives ne sont pas prises en compte.
Dans le cas des artistes, la chambre d’écho est aussi le phénomène ou à force de voir toujours les mêmes choses, on finit pas créer toujours du pareil. On pense que ce qu’on voit sur les réseaux est le reflet global de l’art actuel alors qu'en fait on nous ressert constamment que ce qu’on a déjà regardé et par conséquent, on régurgite les mêmes styles, les mêmes thèmes et les mêmes concepts ad vitam.
Pour s’entendre soi-même et manifester sa propre créativité, il faut diversifier les sources d’intrants le plus possible et aussi prendre du recul pour digérer le contenu et ensuite exprimer le produit en représentations uniques, en perspectives nouvelles, en idées fraiches. Trouver MA voix est quelque chose qui me préoccupe particulièrement dans un domaine où on nous demande continuellement de copier ce qu’on a vu en ligne.
Il y a ce mythe endurant que, si on veut vivre de notre art aujourd’hui, on ne peut plus se passer des réseaux. Qu’on n'a pas le CHOIX. Je n’ai jamais été trop bonne à me faire dire quoi faire, à faire comme les autres ou à me sentir obligée de quoi que ce soit. Alors, j'ai commencé à activement chercher des portes de sorties. Si vous êtes comme moi et que vous avez besoin de perspective sur le sujet, je nous encourage fortement à consulter le podcast “Off the Grid”, qui m’a beaucoup inspirée.
À ce jour, il y a près de 6 mois que je n’ai plus accès à aucun réseau social sur mon téléphone (y compris un siteblocker pour éviter que j’accède à la plateforme via mon navigateur). Mes posts sont maintenant administrés par une tierce personne et, si je veux poster moi-même, il me faut me rendre à mon bureau d’ordinateur pour le faire, et, même à cet endroit, j’ai installé un feedblocker.
Les bénéfices que j’ai notés depuis mon sevrage ?
J’ai retrouvé mon attention à long terme.
Je trouvais que depuis plusieurs années, j'avais beaucoup de difficultés à lire plus que quelques minutes sans être distraite ou avoir à recommencer le même paragraphe 10 fois. Pour avoir parlé avec d’autres personnes, je sais que je ne suis pas la seule à avoir eu le cerveau ramolli par le scrolling. J’ai retrouvé le goût d’écrire aussi. J’ai repris mon blog, et je pense sérieusement à revenir à mes histoires des fois, au lieu de toujours vous servir mon vomi psychologique.
Je rebâtis ma confiance en moi
Comme je l’ai déjà mentionné. Ces plateformes se nourrissent de nos insécurités. D’une part, il est impossible de compétitionner avec le bombardement continu de beautés photoshopée, de performances surhumaines et de vies manucurées. De l’autre, je n’ai pas envie d’être en compétition avec mes pairs. De façon perverse, c’est toujours à qui a le plus de likes ou le plus de followers. J’en ai déjà assez de la compétition que j’entretiens avec moi-même et le perfectionnisme qui me mine la vie. Quand je me compare avec le commun des mortels que je croise dans la rue, je me trouve pas si pire au fond. Quand on se compare, on se console.
J’ai plus de place dans ma tête
J’arrive enfin à avoir les idées claires. Et je me sens tellement plus créative ! Au lieu de naviguer le brouillard engorgé de ma propre psyché, j’ai gagné en clarté et j’ai finalement le CPU disponible pour réfléchir profondément et efficacement. C’est au prix d’un grand effort que j’aspire à revenir au mode de vie des artistes et des penseurs d’avant (l’internet), qui jouissaient au fond de beaucoup de temps et de solitude. On n'est jamais vraiment seuls en ligne.
J’ai TELLEMENT plus de temps dans ma journée
Celui-ci va sans dire. Au lieu de perdre des heures par jour le nez sur mon cellulaire à scroller, ben j’ai pas le choix de me trouver autre chose à faire. Dès le réveil, je n’ai qu’à me lever, prendre ma douche, me faire un café et me mettre à créer. J’AI RIEN D’AUTRES À FAIRE. Et c’est fou comment ma productivité a augmenté sans pour autant me sentir plus fatiguée.
Ma “vraie” vie sociale s’est enrichie
Car je n’ai plus aucune raison de regarder mon cellulaire. Comme l’objet est rendu inintéressant et qu’il ne me procure plus aucun hit de dopamine, eh bien, il reste dans mon sac, tout simplement. Je peux avec aise passer des heures avec mon fils, mon compagnon de vie, mes amis dans aucune distraction numérique ni même l’ombre d’un désir de me trouver en ligne.
Je suis en quête de ma souveraineté énergétique. On fait souvent miroiter que l’argent est ce qui fait rouler une entreprise, mais la réalité est que ma santé est beaucoup plus précieuse. De plus, je cherche à cultiver un lien personnel et direct avec les gens qui me suivent plutôt qu'à travers le voile opaque d’une tierce partie. Plus que jamais, j’ai besoin que mon travail et mes ressources me servent moi et mes clients directement.
Si vous souhaitez me supporter en dehors des réseaux sociaux et m’aider à grandir organiquement, en tant qu’actrice directe dans ma communauté, laissez-moi un review Google. J’aime aussi échanger avec vous et recevoir vos petits mots d’amours et de support dans mon courriel. Ça fait du bien de savoir que ce qu’on vit résonne avec les autres.
Et si vous aimez entendre ce que j’ai à dire et vous souhaitez voir mon art progresser, mettez mon site web en signet, revenez fréquemment pour voir les nouveautés et inscrivez-vous à ma liste d’envoi. Invitez vos amis à s’inscrire aussi. C’est ici que j’existe maintenant, et c’est ici que vous aurez l’accès exclusif à mes promotions (comme le tatouage du mois) et à mes designs quand je les publie une fois par mois.
J’ai de plus en plus envie de cliquer “logout” pour la dernière fois. Il me reste encore quelques petites choses à figurer, mais au final, j'ai besoin de trouver mon alignement et de développer mon entreprise en accord avec les valeurs d’intégrité et de transparence qui sont les miennes.
Merci de continuer de me supporter et de continuer de me partager, vous, comme vous le pouvez :)
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Martine (Tuesday, 28 February 2023 07:30)
Wow!!!!
Merci de ce partage qui résonne vraiment fort en moi!
J’aurais pu écrire ce texte, si j’avais ton talent et passion en écriture.
xx
Chantal (Wednesday, 01 March 2023 07:17)
Oui, très satisfaite d'avoir pris le temps précieux pour te lire ce matin. Tu exprimes ce que plusieurs ressentent, moi entre autre. Bravo et continue à nous faire grandir avec tout tes talents!
Marie-Claude (Wednesday, 01 March 2023 17:19)
Quel beau text mais surtout, qu'elle belle réflexion. Je t'appuie x 1000. J'en suis à penser à un 4e tattoo alors je te ferai signe bientôt. Continue d'être qui tu es!!!