Des crânes et des fleurs

Cette semaine, je veux vous parler un peu d'où j'en suis dans ma création. Dans mon retour aux sources, je suis inspirée dans un premier temps cette année à pousser ces deux thématiques et à les explorer à fond pour les maitriser. J'ai envie d’y introduire une palette atypique et jouer dans les effets atmosphériques. Un beau défi technique. 

 

J'ai ressorti de vieux textes écrits il y a 12 ans, alors que je venais juste de me relocaliser à Gatineau. M’avoir rapproché de la nature et digéré mes premières années de travail comme artiste professionnelle et riche de mon background en beaux-arts, j’arrivais pour la première fois à mettre des mots sur mon style et mon inspiration. Je trouve intéressant de voir que mes aspirations n’ont pas changé. Pourtant, les dix dernières années, mon style a bien digressé. J’ai suivi plusieurs courants, imités plusieurs tendances et je me suis laissé flotter au fil des demandes, souvent inspirées par l’air du temps, par les modes et what’s hot sur Pinterest. Bref, j’ai gagné ma vie, et par le fait même, j'ai acquis des techniques, exploré des idées et accumulé du bagage pour finalement tout stripper et revenir à la source de ce qui m'allume vraiment.

 

Ma passion, mon obsession, se situe perpétuellement autour du thème de la nature morte, cette ode à la vie et à la mort, à l’impermanence des choses, à la beauté d’un moment transitoire saisi sur le vif, à une composition certes statique, mais précaire. Au final, ma motivation artistique est encore et toujours plus spirituelle plus qu’esthétique. 

 

Dans mes expériences psychédéliques et mes méditations, je me trouve fréquemment près de la terre. Un lieu humide et chaud, plein de l’odeur de l’humus en décomposition, foisonnant de bestioles occupées à digérer la matière en décomposition (de là ma fascination pour les insectes et les papillons, ultime symbole de transformation) mais aussi de graines en germinations. Un lieu hors du temps, en continuel mouvement, au “treshold” entre la vie et la mort, ou la transition du cycle se fait dans l’autre sens, non pas du début vers la fin, mais de la fin vers le début. C’est dans cet endroit, étrangement, que j’ai l’impression d’avoir vécu sans relâche. À l’envers de tous, témoin éternel de l’effet du temps, mais aussi actrice dans la transmutation d’un état vers le suivant. C’est une sensation infiniment organique et viscérale que d’exister dans cette énergie et cette “magie” je la rapporte à tout bout de champ dans mon art et dans mes activités (je reviendrai là-dessus un peu plus tard).

 

Le tatouage est un acte transformateur réalisé dans la douleur et dans le sang. Pourtant, comme en témoigne mon imagerie et mon approche, c’est une action qui ne nécessite aucunement d’être “gore” ou violente. Bien qu’inéluctable, La nature dans son cycle est nourricière et pleine d’amour. Toutefois, cet amour n’est pas synonyme que de vie et de croissance, ultimes valeurs et préoccupations de l’humanité. Ignorer ou résister au déclin et éventuellement à la mort, c'est ultimement renier le design inhérent à ce plan d’existence. Ce qui perdure de la vie, l’esprit, l’énergie, se manifeste dans une qualité de présence, une lumière qui émane de chaque chose, et c’est cette lumière qui m’intéresse par-dessus tout, et que j’essaie de capturer avec mon art. La conscience de cette lumière est une expérience impossible à capturer en mot. C’est pourquoi, souvent, je suis sans voix. Perdue dans la contemplation de l’infini, fascinée par le mouvement hypnotique de l’impermanence de tout, raising and falling, waxing and waning.

 

J’arrête ici. Mon idée se poursuit : à suivre dans la découverte de mes prochaines créations.

Write a comment

Comments: 0